CP16 : Escalade de l’amont de la rivière à Pierrot

du 12/08 au 15/08/2022 | Samoëns (74 - Haute-Savoie) | France

Vendredi 12 août

Je pars de Grenoble en toute fin d’aprem, et arrive au parking vers 20 h 30. Je suis au refuge 1h 20 plus tard. Les Nancéens partent de Nancy un peu avant 20 h, et arrivent au parking à 3 h du matin. Ils montent directement et arrivent au refuge à 5 h…

Samedi 13 août

Nous nous levons vers 9 h 30. La nuit a été courte pour certains, nous prenons notre temps pour préparer le matériel de bivouac et d’escalade. En effet, nous avons prévu de monter dans l’après midi au CP16, de descendre au bivouac de la Rivière à Pierrot dormir, dimanche de faire deux équipes, l’une pour aller escalader la cascade en amont du bivouac, et la seconde pour aller revoir l’aval de la rivière, et finir l’escalade des Cataphiles à l’aval, redodo au bivouac, et sortie lundi matin du trou.

Théo a apporté un chili con carne et un cassoulet préparé par sa grand mère pour nos repas au refuge. C’est pas mal du tout !

Nous partons du refuge vers 14 h, bien chargés. Je récupère mon matos, ainsi qu’une C32 et 2 amarrages dans le CP19. Je ne monte pas trop vite, mais je dois faire souvent des pauses pour attendre les troupes, et j’ai le temps de faire sécher la chemise ! Nous arrivons au CP16 vers 17 h 30.

Nous nous changeons, et finissons de préparer les kits de Lorine, Thomas et Julien. Nous nous retrouvons vite fait avec pas mal de matos qui déborde des kits… J’insiste pour faire virer tout le superflu (le 3ème change, la vaisselle, les 3 bouteilles d’eau,…), et Théo vide le kit de Julien pour faire l’inventaire… Nous y trouvons pas mal de choses, dont une belle pince multiprises (??)… Après négociations, nous arrivons à tout faire entrer dans un kit par personne !

Nous entrons sous terre à 19 h. La descente est lente, très lente. Je suis devant pour le cheminement. Théo ferme la marche. Je commence à avoir bien froid à partir de la base du P50 du CP16, et je ne me réchaufferai pas jusqu’au bivouac… Derrière, Théo essaye d’activer les troupes, il prend même le kit de Lorine pour qu’elle avance un peu plus vite. Au puits de jonction du CP16 avec le Rasoir, Julien qui est derrière moi cogne son casque contre la paroi, casse le support de sa lampe (une lampe Décath’), lampe qui se fait la malle au fond du méandre… Jen suis quitte pour aller la récupérer, et lui pour continuer sur sa lampe de secours.

On me demande régulièrement combien de temps il reste pour aller au bivouac, mais au bout d’un moment, je suis incapable de répondre, le horaires que nous avons habituellement sont complètement explosés. Finalement, nous arriverons au bivouac à 3 h 30. Je crois bien que c’est un record : 8 h 30 pour aller au bivouac, alors qu’en temps normal, il faut entre 3 et 5 h max !

Le temps de préparer le bivouac, faire chauffer de l’eau et sustenter tout le monde, nous nous couchons à 5 h du mat. Je mets à tout hasard le réveil à 9 h.

Dimanche 14 août

9 h. Le réveil sonne. Aie, j’ai bien dormi, mais j’ai déjà mal à la tête, le manque de sommeil se fait sentir. Personne ne bouge, certains ronflent encore. 9 h 40, je me décide à sortir de mon duvet, plis mon couchage et mets en branle le réchaud. Théo me suis de très prêt, puis ça y est, le reste de l’équipe se met à bouger.

Au vu de la vitesse de progression de la veille, nous révisons nos objectifs à la baisse : Théo et moi irons faire l’escalade ne amont du bivouac, tendis que les autres commencerons à remonter vers la surface. A l’aller, j’avais balisé, ou tout du moins bien montré, tous les carrefours où il ne faut pas se tromper pour remonter vers le CP16. Nous laissons aussi une perfo à Thomas pour qu’il fore des trous pour doubler certains points sur le chemin du retour.

Théo et moi partons vers 12 h 30. La seconde équipe vers 13 h. 20 min plus tard, nous sommes devant la cascade à escalader. Théo est chaud pour se mettre aux pulses, et hop, c’est parti. Bon, on ne peut pas dire que la roche soit bonne, ça reste du bel Hauterivien classique, avec toutes ses couches de marnes. Pas mal de blocs de toutes tailles tombent dans la vasque à mes pieds, mais Théo grimpe comme un chef. Au bout d’une quinzaine de mètres, il fait un relais, je le rejoins pour continuer l’assurance tout en enlevant le pulses. Certains viennent sans efforts (je dirais presque même sans actionner la came…), d’autres me posent problème, d’autant plus que je n’ai pas le marteau pour les décoincer.

Il refait un relais plus confort 2 m plus haut, pour que je sois à l’aise pour assurer (les pieds sur une petite banquette, et surtout hors de chute de blocs !). Il reste à grimper environ 5 ou 6 m en vertical, et à se décaler d’autant en horizontal pour atteindre l’arrivée d’eau. Du relais, c’est moins sympa que vu d’en bas. L’arrivée d’eau parait plus petite, c’est un peu la déception. En revanche, au dessus de cette arrivée, il faudrait franchir un toit bien horizontal, et ensuite, il y a un beau méandre qui barre, toujours dans l’Hauterivien. Nous sommes difficilement capables de donner des dimensions : en largeur, l’arrivée du méandre doit dépasser le mètre, mais derrière, ça a l’air bien plus large, et il n’est pas possible de voir le plafond (20 m ? 30 m ? plus ?). Et nous nous disons que ce qui est bien avec cette escalade, c’est que même si l’arrivée d’eau queute, nous voyons une suite plus haut que nous ne devinions pas d’en bas !

Comme nous sommes prêts de l’arrivée d’eau, Théo s’y dirige. Plus il monte vers la flotte, plus la qualité de la roche diminue. Il termine la traversée sur des oeufs en serrant les fesses. Et il confirme ce dont nous avions peur : ça queute, l’eau sort, 2 m après le déversoir, d’un joint de strate impénétrable.

Théo revient en déséquipant l’escalade. En enlevant les pulses, il se rend compte que sous l’effet du travail à la montée, certains sont sortis de 30 % de leur longueur… Mais il me rejoint au relais sans plomb. Ouf ! Il est 16 h, et il ne nous reste pas beaucoup de corde, enfin, en tout cas pas assez pour monter tout droit, puis traverser vers le départ du méandre. Nous décidons de mettre à peu près au propre les relais, et de rejoindre le bivouac. La suite serra pour une prochaine fois, et elle va nous faire rêver parce qu’elle est vraiment alléchante ! Au vu de la sortie, je propose d’appeler cette escalade l’escalade de la Pinaille.

Nous arrivons au bivouac vers 17 h. Nous faisons une bonne pause bouffe, tchachons de la pluie et du beau temps, rangeons le bivouac pour qu’il soit propre, faisons un inventaire de ce que nous laissons, puis partons vers la sortie à 19 h. Au local de nettoyage de la vaisselle, nous lavons la vaisselle, puis continuons sans courir.

40 min plus tard, nous sommes de l’autre côté du Puits que l’on Traverse. Et là, nous entendons l’autre équipe qui était censée remonter… Nous échangeons une regard qui en dit long… « Oh P***, la remontée va être longue, nous ne sommes pas sortis… ». Un nouveau record vient d’être battu : 7 h pour faire 300 m de distance, avec 3 petits puits remontants, 1 traversée, et 2 puits et demi à descendre !

Nous les rejoignons, ils sont à mi-chemin entre le Puits que l’on Traverse et les 4 Vents. Avec le sourire, ils nous disent qu’ils ont fait ici une pause d’1 h 30 ! Nous les secouons un peu, puis repartons vers la sortie. Il est presque 20 h. Théo reprend le kit de Lorine. Je suis devant, Lorien est derrière moi, suit Julien, puis Thomas et Théo.

A 21 h 30, nous arrivons à la base du Rasoir. Je monte en attendant en haut de chaque longueur de corde de voir arriver Lorine au frac en dessous. C’est long, très long, et je tremble de froid en continue. Même la remonté de la grande longueur du Rasoir ne me réchauffe pas. Au sommet, j’ai le temps de réfléchir aux endroits où il serait possible de construire un vrai point chaud pour mettre Lorine en attente au chaud et déclancher un secours. Je me traite de con de ne pas avoir avec moi mon micro-trac et une corde de secours. Dans la descente du Rasoir, avec la fatigue, elle prend la seule main courante pour un puits, et arrive à mettre son descendeur sur celle-ci, mais se bloque tout de suite. C’est la galère pour qu’elle se débloque. Nous arrivons de l’autre côté du rasoir au pied du CP16 à 1 h du matin. Je la sonde pour savoir si la sortie est jouable ou non. Elle est HS, mais le moral est toujours là, et elle m’assure plusieurs fois qu’elle pourra sortir. Au pire, dans les puits du CP16, il y a 2-3 endroits où il est possible de monter un point chaud confortable. Je n’en mêne pas large, je crains l’arrivée d’un épuisement.

Lundi 15 août

La remonté est longue, très longue. A chaque passage de frac, je la sens ahaner d’effort. Mais plus nous montons, plus je me rassure, ça va le faire. Le méandre de sortie se passe dans la douleur, ainsi que la traversée juste avant le puits d’entrée. Nous sortons à 5 h 30 du matin. Théo et Thomas sortent à 6 h. Théo a profité de la lente montée pour doubler tous les points, il suffira de revenir avec un peu de dyneema et plaquettes/goujons pour finaliser le travail. Encore un record de battu : 16 h 30 pour remonter du bivouac !

Dehors, les rochers sont secs, mais l’herbe et le sol est bien humide. Je me change, laisse les autres dans la pelouse où ils veulent dormir, et descend au refuge pour tenter d’y faire un bon somme.

Devant le refuge, il y a une jeune femme en train de démonter sa tente. En me restaurant un peu avec un paquet de cacaouettes (mon dernier repas et hier à 18 h !), je tchatche un peu avec elle, et j’apprends qu’il a pas mal plus vers 20 h hier soir. Je me mets au lit à 8 h. A 9 h 30, des coups contre la paroi du refuge et tout un tas de cloches me réveillent. M*** j’ai oublié mes bâtons dehors. J’ouvre les volets, et effectivement, il y a juste sous la fenêtre une dizaine de moutons en train de se fritter pour tenter de boulotter mes battons. Ma fibre carnivore se réveille, et j’essaye d’attendrir la viande à coup de cailloux et de récupérer ce qu’il reste de mes bâtons… Je me recouche et dors d’une traite jusqu’à 14 h.

J’ai un mal de crâne qui ne passe malgré les Dolipranes. Je nettoie le matos, range un peu, et attends les Nancéens qui arrivent un peu après 16 h. A priori, ils ont bien dormis. Nous mangeons le cassoulet, et descendons aux voitures où nous arrivons vers 19 h. J’arrive sur Grenoble vers 22 h, toujours avec mon mal de crâne, mais aussi avec un estomac plus bas que mes talons.

Le matin, je vois qu’à 4 h 19, Théo m’a envoyé un SMS me disant que ça y est, ils sont arrivés sur Nancy, et qu’il va se coucher… J’imagine que la journée de mardi aura été difficile…

Bilan spéléo

Bon, l’escalade que nous avons faite queute malheureusement. Du bas, nous ne pouvions pas deviner que l’arrivée d’eau était un tout petit truc, mais ni que la vraie suite, elle est au dessus. Il faut absolument y retourner. Je ne sais pas si au dessus c’est un grand méandre qui barre où si c’est la base d’un autre grand puits, mais en tout cas, il y a un volume qui semble bien plus important que la branche du collecteur et des Hauts Pots. En terme de débits, l’eau qui vient de l’escalade que nous avons faite contribue pour bien 1/3 du débit à l’aval du bivouac. Pour moi, ça ressemblerait bien à la suite logique de la grande galerie du bivouac, je ne dis pas que la suite sera facile d’exploration, mais c’est à proximité du bivouac (max 20 min), et ça peut vraiment aller loin !

Bilan humain

Nous en avons un peu débrieffé pendant la sortie et après, et je le relate parce qu’il est important de le discuter afin de ne pas réitérer les erreurs que nous avons faites. Finalement, nous sommes sortis par nos propres moyens et sans casse, mais nous sommes probablement passés très près d’un secours difficile.

Tout d’abord, je n’ai pas tilté pendant la montée vers le trou : nous avons mis plus de 3 h pour y arriver, nous n’étions pas plus lourds que d’habitude. Ca aurait du me mettre la puce à l’oreille que physiquement, il y avait un élément de l’équipe limite, et que nous aurions du revoir les objectifs du weekend. C’est une erreur de ma part.

Théo, la connaissant, m’avait prévenu que Lorine était lente, mais nous ne nous attendions pas lente à ce point, lui aussi a été très surpris. L’erreur a probablement était de sous-estimer la difficulté de la spéléo Haute-Savoyarde (froid, humidité, courant d’air, marche d’approche,…) au regard du niveau technique.

Ensuite, une fois sous terre, c’est vraiment à partir du Rasoir que nous avons perdu du temps. Aux 4 vents, je me suis posé la question de savoir ce qui aurait été le plus judicieux : aller au bivouac ? Ressortir ? Au vu de la fatigue à ce moment là, j’ai pensé que la meilleure option était le bivouac, mais je ne sais toujours pas si c’était la bonne décision à prendre.

Enfin, sur l’équipe, nous étions deux à connaître les conditions de Samoëns, un troisième avec une bonne expérience spéléo, et deux autres avec beaucoup moins d’expérience. J’aurai du avoir avec moi un micro-track (Théo, derrière, en avait un) et une petite corde de secours (que nous n’avions pas et que nous n’avons jamais lorsqu’on part en explo chargés comme des mulets) pour aider à la remontée des puits; Nous aurions probablement gagné plusieurs heures à la remontée…

TPST : 34 h

Participants à l'activité

Xavier RXavier R.

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