Motivations
Cette fois-ci, ce n’est pas un compte rendu d’exploration, ni de classique (quoique…), mais d’une sortie de terrain dans le cadre de mon travail. En effet, il y a quelques années, Marianna, amoureuse du Dévoluy, a trouvé des galets bizarres au pied de la tête de l’Obiou. Bizarres parce que constitué de lithologie normalement inexistantes sur le Dévoluy, mais plutôt provenant du massif des Ecrins et du Champsaur. Aujourd’hui, la profonde vallée du Drac sépare ces deux massifs. La question est de savoir si nous pouvons d’une part avoir une idée plus précise de la source de ces galets, et de leur âge. Après une fouille approfondie, Marianna avait trouvé que ces galets provenaient en fait de sédiments plaqués dans des grottes fossiles de la paroi de la tête de l’Obiou. Elle en avait échantillonné quelques uns pour effectuer des datations par isotopes cosmogéniques (10Be et 21Ne), mais la très faible concentration dans ces isotopes n’a pas permis d’obtenir des données interprétables. Ceci-dit, cela semble bien vieux… C’était en 2013-2015.
Cette année, mon collègue Pierre, spécialiste de la géomorphologie alpine et des datations des objects récents, a mis en place un petit projet de recherche pour un étudiant en M2 (François) sur ce sujet. Nous profitons alors de l’été pour aller ré-échantillonner ces sédiments, et permettre les préparations chimiques pour l’automne, afin que François puisse avoir les concentrations (et les âges ?) pour son stage de M2 de l’hiver et printemps 2021. Marianna nous accompagne, avec deux spéléos jurassiens qu’elle a rencontrée la semaine précédente (Apolline et Arnaud). En fait, certains Vulcains en ont déjà entendu parlé parce qu’ils nous avaient contacté il y a 1 ou 2 ans pour faire la traversée V11-V6.
Mercredi 12 août
Pierre passe prendre François sur le campus, puis me cueille devant chez moi peu après 7 h. Nous filons à Pellafol, puis montons au col de la Samblue, où nous récupérons Vivien qui a passé la nuit au col dans son camion aménagé. Nous arrivons au parking peu après, mais avec 40 min de retard sur l’horaire prévu. Nous préparons les sacs, puis commençons à monter par le sentier CAF vers le Grand Obiou. 800 m de dénivelée plus haut, au pied du dernier couloir menant au col sous l’Obiou, nous bifurquons pour atteindre le porche de la baume des Jalabres.
Nous mangeons, refroidissons, puis entrons sous terre. Nous visitons la grotte, elle vaut le coup, c’est un méandre fossile magnifique de dimensions exceptionnelles, et qui s’arrête au bout de 200 m environ sur une grande salle et un grand miroir de faille. Nous revenons en échantillonnant en deux lieux distincts. Vu la taille des galets trouvés, ou les quantités de sables échantillonnés, nous devrions avoir assez de matériel pour sortir du blanc analytique et obtenir de belles données. Nous ressortons au bout de 4 h.
Pour terminer la journée, nous allons dans la falaise en face, visiter la glacière/grotte du Petit Obiou. Dans la grotte, très courte, il y a un très beau rideau de glace de regel. Dans un recoin, en fait la suite logique de la galerie, un courant d’air froid filtre à travers les blocs, peut-être qu’une désobstruction pour enlever les blocs permettrait de faire un peu de première…
En sortant, nous montons au porche au dessus. Enfin, Arnaud et moi nous arrêtons à 7-8 m du porche, le dernier pas étant un peu exposé. Les p’tits jeunes le passent en courant. Le fond de la dépression d’entrée est occupée par un névé, mais ils trouvent un passage entre neige et rocher, et parcourent une galerie descendante.
Nous redescendons bien fourbus et bien chargés au voiture, où nous arrivons un peu avant 20 h. Marianna rentre chez elle dans le Valgaudemar fêter l’anniversaire de son conjoint. Apolline et Arnaud rentrent de l’autre côté de la vallée, où ils sont en vacances dans la maison familiale. Pierre, Vivien, François et moi nous arrêtons au col de la Samblue où nous passons la soirée et passons la nuit, Pierre sous tente, Vivien dans son camion, François dans le réduit de la cabane ONF, et moi à la belle dans la forêt. Il faut dire que la météo prévue est très bonne.
Jeudi 13 août
Pas de bol, à 4 h 30 du matin, je sens des gouttes tomber sur le visage. J’ouvre le yeux, et je vois le ciel tout étoilé. Je me dis que non, il ne doit pas pleuvoir, ce n’est pas possible, alors, je fais comme si de rien n’était et referme les yeux… En fait, il pleuvinera encore pendant une heure et demi. Mais lorsque le réveil sonne, tout a déjà séché !
Un peu avant 8 h, Marianna puis Apolline et Arnaud nous rejoignent. Apolline et Arnaud sont avec leurs deux fils de 8 et 10 ans.
Nous remontons sous la tête de l’Obiou, mais cette fois-ci, nous allons à la baume du Petit Odieux. En fait, elle est constituée de plusieurs entrée. Les deux plus grandes entrée sont les trous qui forment les yeux sous l’Obiou, dans la falaise. La montée à la petite entrée, la plus facile d’accès, est quand même rude : c’est très raide, et très impressionnant.
Nous entrons sous terre vers 11 h. Une grosse partie de la cavité se visite à plat ventre, ce qui ne convient pas à Pierre qui décide de nous attendre à l’extérieur, sur la vire herbeuse. Nous visitons la grotte, allons dans les yeux (la sortie dans la falaise et la vue est magnifique, c’est dommage que l’accès par l’intérieur soit aussi chiant), puis nous revenons en sortant quelques dizaines de kilos de remplissage…
Nous mangeons, puis les jurassiens se chargent comme des mules (ils ne veulent rien nous laisser porter !) et descendent à leur voiture. Un très grand merci à eux pour leur précieuse aide !
De notre côté, Marianna, François et Vivien grimpent dans la faille au dessus voir les poches de galets emprisonnés. Pierre et moi de suivons pas, nous ne sommes pas à l’aise pour escalader et franchir des petites vires caillouteuses sans assurance dans ce paysage sub-vertical… Les autres sont de vrais chamois !
En milieu d’après midi, nous commençons à descendre, puis prenons une rincée. Mais cette fois, c’était prévu par les prévisions météos ! Nous arrivons aux voitures un peu avant 17 h.