Au cours d’un petit weekend en Ardèche, nous profitons du début d’après midi du dimanche pour plonger aux Gouls. Comme à chaque fois que j’y passe, il y a un stage FFESSM (à croire qu’ils y sont en continue !). Mais cette fois-ci, ils sont nombreux (>20 plongeurs), et ils font tourner les compresseurs thermiques en continue sur le site…
Nous profitons de leur pause de midi pour avoir les sources là peu près libres. Arnaud plonge au Goul du Pont, tandis que le reste de la troupe plonge à la Tannerie. Seuls Constance, Doudou et Emilien restent au soleil à d’occuper d’un autre type de bouteille ! Pascal fait ds exercices avec son recycleur, et ressort parce qu’il a trop froid.
Romain et moi partons en vue d’aller faire un tour dans le puits à 750 m de l’entrée. Romain est en recycleur, je suis en ouvert avec quatre 6 L 300 b. La visibilité est bien dégradée jusque vers 350 m de l’entrée, probablement la distance à laquelle le stage promène ses initiés. Je pose mon premier relias un peu après l’étiquette 350 m. A 670 m, j’arrête d’utiliser mon second relais, et passe sur mon principal tout en gardant mon relais sur moi, me disant que ce n’est pas la peine que je m’embête à le débréler si près du but, puis à le rebréler dans 5 min. Au puits, je descend à -27 m, je décide de m’arrêter là, Romain me double et je le regarde descendre un peu plus bas. J’en profite pour de nouveau changer de détendeur pour équilibrer mes bouteilles principales.
Et là, c’est le drame. Le détendeur que je viens de lâcher se met en débit constant. Je n’arrive pas à le stopper. Et m… Je tente de fermer le robinet, il est bloqué par ma bouteille relais qui est juste au dessus, et sous le stress, je n’arrive pas à le dégager et à le fermer. Je remets le détendeur en débit constant dans la bouche, et je me transforme immédiatement en crapaud essayant sa première clope. Avec toutes les bulles, je ne vois plus rien autour de moi, et le masque commence à se remplir petit à petit (forcément, il ne peut pas attendre un moment moins stressant…). Je me mets à remonter en tentant de garder mon calme, en me disant qu’avec une profondeur moindre, ce sera plus facile de gérer. Mais avec mes manips, j’ai coincé entre mes deux bouteilles l’inflateur de ma stab, comme un con, je ne purge pas tout de suite ma stab, et je me bloque sur un plafond. J’identifie et résous vite le problème, et arrive au sommet du puits. Je me pose, et en secouant les bouteilles, j’arrive à dégager le robinet de la bouteille qui pose problème, et le ferme. Le bruit des bulles disparaissant, le stress redescend un peu. Je me dis que j’essayerai de réouvrir ma bouteille un peu plus loin, et je regarde le manomètre : 0 bars. Gloups… J’essaye de réouvrir en passant que l’aiguille remonterait un peu… Et bien non, elle reste désespérément en bas, et le débit de bulles me paraît moins fort… Et évidemment, ma stab est branchée sur cette bouteille… je n’aurai pas moyen de la regonfler de tout le trajet. D’un coup, je me sens loin de la maison, même si je sais que j’ai encore suffisamment de gaz pour rentrer.
Je n’attends pas Romain, et j’avance vers la sortie. En terme de consommation, je récupère vite ma consommation de croisière. Romain me dira plus tard que j’ai pourtant du revenir très vite car il n’a pas réussi à me rattraper. Avec une bouteille en moins aussi loin de la maison, je ne me sens pas rassuré. Et puis au fur et à mesure que j’avance, je me pose des questions sur où j’avais posé mon premier relais. Ne l’aurais-je pas raté et dépassé ? Malgré ma bonne mémoire, je ne suis plus sûr de moi quant’à la distance à laquelle je l’avais déposé. Lorsque je le retrouve, c’est un grand soulagement, et d’un coup, je me sens mieux.
La fin du retour se fera dans une bonne touille, en croisant tout un train de plongeurs à l’a queue-le-leu (8 ? 10 ? je n’ai pas compté). Les initiés ont le nez sur le fil, ils ne regardent pas le reste. Chaque cadre que je croise me met sa lampe en plein masque, surement pour voir qui je suis… J’ai l’impression de me retrouver sur les routes de nuit au Pérou, ou tout le monde roule avec le maximum de watts possible en grillant les rétines des personnes croisées… Merci les copains !
Je sors au bout de 90 min de plongée. Romain arrive 2 min après moi dans la vasque. Quand je lui raconte mon aventure, il me dit qu’il n’a rien vu ni entendu, juste qu’il a été surpris de ni me voir au sommet du puits l’attendre (surtout que j’avais amplement de quoi l’attendre), ni d’avoir pu me retrouver sur le chemin du retour.
Au bord de la vasque, nous vérifions la pression dans la bouteille : elle est bien à zéro, mais a priori, l’eau n’est pas entrée dedans, j’ai bien fait de fermer le robinet.
Epilogue
Je n’ai pas l’habitude de faire un compte rendu aussi long pour une « simple » classique. Mais c’est la première fois qu’il m’arrive un tel incident, et surtout au point le plus éloigné de la plongée : ce n’est pas cet incident qui m’a poussé à faire demi-tour. Pour moi, ça a été très riche d’enseignements, surtout sur mes perceptions sur toute la durée du retour, et c’est pour cela qu’il m’a semblé important de tenter de le relater avec des détails. Vous l’avez compris dans mon CR, ça m’a bien stressé, mais à aucun moment je n’ai eu peur ni paniqué, ce qui m’a permis de gérer le problème relativement sereinement. Je pense que c’est en très grande partie dû au fait que la plongée était plutôt bien planifiée, que j’avais respecté les consommations de sécurité avec un peu de marge à l’aller, et que je me sentais bien dans l’eau. Après, cela m’est arrivé dans une eau très claire, sans touille qui tombe, où lâcher le fil ne pose pas de problème, et où il n’y avait pas d’étroitures vers la sortie ! Autant dire, des conditions idéales…